La mésange rebelle cloue le bec du préfet
Pendant des semaines, NGE-Atosca et les préfets ont fait croire que la parcelle de la Crem’arbre était à « faible enjeu écologique », et pouvait être défrichée. Il a fallu un nid de mésange bleue pour découvrir que l’abatage était illégal.
Nous sommes mi-mars, les 1500 m2 de forêt sont ravagés et seuls une poignée d’arbres subsistent encore grâce à leurs occupant·es. Mais voilà qu’une militante « écureuil » aperçoit un petit oiseau, le filme et l’envoie sur des boucles de messagerie. Un membre des Naturalistes des terres, suspectant une mésange protégée, interroge des ornithologues qui confirment : c’est un couple de mésanges bleues qui construit son nid. Or l’arrêté de mars 2023 qui autorise les travaux souligne qu’à partir du moment où un oiseau protégé nidifie, ceux-ci doivent s’arrêter. À partir de là, Jean Olivier, par ailleurs militant de l’alternative ferroviaire (cf. page 5), nous raconte que le lundi 18 mars, « une vidéo est postée où l’on voit des lacrymos lancés contre des zadistes qui tentent de ravitailler les écureuils, et je remarque que les tirs vont en direction de l’arbre où niche la mésange. Je rédige donc un projet de plainte sur ce constat ainsi que sur l’intention délictuelle du préfet qui, dans son communiqué de presse du 21 février, disait qu’il voulait déloger les militant·es des arbres afin de les abattre ». Les associations d’opposant·es (Naturalistes des terres, LVEL, UPNET, GNSA) le mandatent pour aller en justice.
Le jeudi suivant, un membre de TV Bruits réalise un montage vidéo de la nidification et de l’intervention des forces de l’ordre. Le vendredi, Jean Olivier est auditionné par la gendarmerie et des agents de l’Office français de la biodiversité (OFB). Ceux-ci lui indiquent que « grâce au visionnage de cette vidéo, ils confirment la nidification, ce qui renforce le fait qu’il ne doit plus y avoir de coupes d’arbres sur la parcelle. Je leur fais remarquer qu’il y a jusque-là une carence des agents de l’État et que c’est pour cette raison que des militant·es occupent les arbres ». Les agents de l’OFB s’en étonnent puisqu’ils affirment avoir transmis leur avis au procureur où ils spécifient que la Crem’Arbre est une zone « à forts enjeux écologiques », ce qui interdit de couper les arbres avant le 1er septembre… Un avis de l’OFB dont personne n’a eu connaissance, malgré les demandes des associations comme des médias. Il a donc fallu cette audition pour apprendre que le défrichage autorisé par le préfet a bel et bien eu lieu sur une zone protégée ! Jean Olivier demande alors un écrit qui prouve leurs dires afin de stopper l’abattage des arbres : « On me répond qu’en tant que plaignant, je peux demander au Parquet de me transmettre le procès verbal du dépôt de plainte, sur lequel il est écrit noir sur blanc les constatations de l’OFB sur la nidification de la mésange, et sur le fait qu’aucune coupe ne peut être réalisée ». Son avocate demande le document dans la foulée et l’obtient dans l’heure. À la Crem’arbre, on célèbre la victoire... « Cela illustre vraiment la diversité des tactiques en action », nous confie Jean Olivier. Mais cela reste fragile : ultime provocation, une pelleteuse de NGE-Atosca revient sur la parcelle quatre jours plus tard et sectionne une partie des racines de l’arbre où nidifie la mésange.
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