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EDITO

À l’offensive !

Tu peux pleurer sur ta porte de ministère, Griveaux. Avec ta tête de premier de cordée, tu peux gémir contre ces « pyromanes de la république » : on s’en balance. T’as du t’enfuir en catimini ? Bien des gilets se sont réjouit de la nouvelle, ce 5 janvier. Les « agitateurs » que tu méprises tant à longueur d’interviews, ont fini par venir te chercher, toi, ton Macron et ses sbires. Une bande de crapules mi-technocrates, mi-banquiers d’affaires. Oh, mais continuez ! Continuez à vous plaindre de ces radars cramés et ces péages incendiés, de ces barricades en feu et ces autoroutes bloquées, de ces milliers d’émeutiers qui animent les samedis soir, de ces centaines de milliers de gilets jaunes qui manifestent sans fin. Nous, on y lève le poing, à l’ensemble de ce mouvement qui secoue méchamment l’hexagone. Ça rappelle la chemise arrachée du patron d’Air France : alors qu’éditocrates et journalistes s’égosillaient à dénoncer une agression impardonnable, on était nombreux à se fendre la poire en repassant les images en boucle. Le grand patron au salaire mirobolant prenant la fuite, apeuré. La peur qui change de camp, un instant…

Ces quelques lignes ne sont pas un appel à la violence ou au soulèvement. Ce serait vain. À des degrés divers, la capacité à s’opposer physiquement à la police comme la volonté de soulever le peuple font partie de ce mouvement hétéroclite. C’est d’ailleurs intrinsèque à toute tentative de changement social important, à toute révolte qui a marqué un tant soit peu l’histoire. Les gilets jaunes ont bien des défauts et des qualités. Mais si l’on en parle aujourd’hui, c’est du fait de leur détermination à bousculer, à « ne rien lâcher » tant qu’ils n’auront pas mis ce gouvernement à genoux. Les pétitions, les blocages, l’occupation des ronds-points, les actions coups de poing, les manifs à répétitions, l’émulation sur les réseaux sociaux, jusqu’à cette rage et cette révolte qui s’exprime tant par le refus de se laisser encadrer par les préfectures sur des parcours préétablis, que dans le corps à corps avec la police, les affrontements, les jets de pavés et la décoration des boulevards.

Et puisque le pouvoir est fébrile, il fait lui aussi appel à la violence, celle de l’État et de sa police, avec un bilan effarant : plusieurs mains arrachées, une quinzaine de personnes éborgnées, une centaine de blessées graves, plus de 300 vidéos ou récits de violences policières. Des milliers d’interpellations, des centaines de gardes à vue, un nombre de personnes emprisonnées important, sans chiffre exact à ce jour.. Rien qu’à Toulouse, les gilets recenseraient une vingtaine de personnes incarcérées mi-janvier. C’est donc une répression historique. L’État et les grands médias ont maintenu cette réalité dans l’ombre durant de longues semaines, ignorant même totalement un rapport d’Amnesty International mi-décembre.

Malgré la désinformation médiatique et les mensonges de l’État, malgré les chiffres de mobilisation divisés par trois et le déferlement de violences policières, malgré le froid, malgré « les fêtes », ils sont toujours des dizaines de milliers à faire vivre ce mouvement dans chaque ville et chaque patelin de ce pays. Alors quand vous verrez de nouveaux cette élite journalistique ou ces hauts fonctionnaires au salaire de bourgeois, s’époumoner contre l’infiltration de casseurs, appeler au calme, ou pondre des analyses contre ces extrémistes radicalisés, souvenez-vous : ce sont des tocards alliés au pouvoir en place et aux détenteurs des moyens de production. Puisque le mouvement des gilets jaunes va contre leurs intérêts de classe, pourquoi se gêneraient-ils pour nous mépriser, nous diviser et nous manipuler ?

Empêchons-les de parler, continuons de nous organiser, de manifester, de bloquer. Il reste encore du monde à convaincre de porter le gilet, il reste encore la grève générale à programmer. À Samedi !